Le village d'Olargues et le pont du Diable
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Le Haut-Languedoc un territoire peu connu qui reste à découvrir

Doté d’une nature somptueuse, d’un patrimoine riche et varié le Haut-Languedoc affiche paradoxalement un vrai déficit de notoriété. Des passionnés investis localement dans le patrimoine se mobilisent pour le valoriser et le dynamiser.

Le village d'Olargues et le pont du Diable

Le village d’Olargues et le pont du Diable

Au sein du Parc régional du Haut-Languedoc, l’Hérault et le Grand Orb appartiennent à cet arrière-pays du nord de Béziers, appelé un temps de façon péjorative «Hauts cantons», qui ne manque pas d’atouts qu’une quinzaine d’associations, des particuliers et quelques maires veulent mieux faire valoir dans une perspective de développement durable. Dans ce but, ils ont créé en 2020 la Fédération Hérault Tourisme pour tenter de redresser une situation qu’ils jugent inquiétante. En effet, ce territoire affiche la plus importante diminution de la population du Haut-Languedoc et draine seulement 3% du tourisme du département. Alors même qu’il est largement pourvu en patrimoines (naturel, bâti, historique, religieux, architectural, industriel et immatériel) disséminés entre Lodève et Saint-Pons le long des vallées de l’Orb et de son affluent le Jaur, dominées par le massif de l’Espinousse et du Larzac. Comme l’attestent les nombreux châteaux et remparts médiévaux, villages fortifiés, édifices religieux, héritages des populations anciennes (Wisigoths, Celtes, Francs, communautés chrétiennes, protestantes et orthodoxes) qui ont séjourné ici, attirées par la «Provincia Romana» reliant l’Espagne à l’Italie. Des vestiges, bien dégradés pour certains, qui n’en constituent pas moins la mémoire vive de cette terre chargée d’histoire.

La réhabilitation de Notre-Dame de Nize à Lunas par Frère Marie Pâques

Notre Dame de Nize

Le Gand Orb, riche de 65 églises et chapelles, abrite autour de deux anciennes abbayes bénédictines de Villemagne et de Joncels de nombreux édifices religieux. Tel le sanctuaire Notre-Dame de Nize, à Lunas petit village du nord de l’Hérault aux portes du parc naturel régional du Haut-Languedoc situé dans les Cévennes méridionales que Frère Marie Pâques, «moine entrepreneur» comme il se définit lui-même, a entrepris de restaurer et de réhabiliter. Fort de son expérience acquise pendant vingt-cinq ans comme cellérier à l’abbaye cistercienne de l’île de Lérins (Cannes) et aidé par l’association «Les Compagnons du Sens» qu’il a fondée en 2016, il s’est attaqué a la réhabilitation d’un ensemble architectural et religieux situé dans un environnement naturel exceptionnel, constitué d’une chapelle et de son clocher, d’un ermitage et d’une aire de pèlerinage jouxtant une singulière «Fontaine des yeux», dont l’eau de source, réputée depuis des siècles pour soigner ou soulager des affections oculaires, attire de plus en plus de monde. Une première tranche de travaux portant sur la restauration du presbytère a été inaugurée en 2021.

Frère Marie Pâques

Pour la suite, à savoir la réhabilitation de la chapelle Notre-Dame de Nize (du nom du ruisseau qui la jouxte), un appel aux dons a été lancé via des associations pour sauver ce lieu, dont l’animation doit contribuer au développement de l’économie touristique locale dans une perspective de développement durable. Un festival de musiques «Festinize» au sein de la chapelle, suivi d’une dégustation de vins du Prieuré de Nize est destiné à la restauration de l’ensemble patrimonial. Il réunit chaque été depuis trois ans de nombreuses personnes de la région ainsi que des pèlerins en route vers Saint-Jacques de Compostelle. Ces derniers empruntent traditionnellement la mythique voie d’Arles «Via Tolosana» proche cheminant vers Joncels, Lunas et son église Saint-Pancrace, Le Bousquet d’Orb, Saint-Gervais-sur-Mare -sa chapelle des Pénitents blancs et l’église Saint-Gervais-Saint-Protais, Neyran lieu de pèlerinage jusque dans les années 60 et sa chapelle vouée à Saint-Roch patron des pèlerins ou encore Saint-Pierre de Brousson à la Tour-sur-Orb, dernières étapes avant le Tarn voisin.

Le village fortifié de Boussagues témoin de l’histoire régionale

La maison du Bailli de Boussagues

Côtoyant ce patrimoine religieux le grand Orb abrite également un riche patrimoine médiéval rappelant au visiteur que la plupart des communes se sont formées au Moyen-Age entre le IXe et le XIIIe siècle pour connaître un fort développement jusqu’au XVI e siècle. Ainsi sur la commune de la Tour-sur-Orb qui regroupe onze hameaux, le village fortifié de Boussagues dont la seigneurie était une des plus puissantes du Haut-Languedoc, compte deux châteaux classés, un manoir Renaissance, deux églises dont l’église Notre-Dame-de-la-Pitié, ainsi que la Maison du Bailli datant du XIIe siècle appelée aussi Manoir de Toulouse-Lautrec pour avoir appartenu un temps à la mère de l’artiste. Si ce dernier n’y a jamais habité, en revanche un fantôme hanterait de temps à autre les lieux… une étrange histoire racontée par son actuel propriétaire Daniel Pierson descendant de cette famille, co-fondateur par ailleurs de«Patrimoine Hérault Tourisme» et président des «Amis du vieux Boussagues». La grande bâtisse se visite sur rendez-vous.

Un patrimoine rural construit en pierre sèche à entretenir

Mur en pierre sèches en contrebas de la Tour Carrée

Autre lieu, autre histoire, celle du village de Colombières-sur-Orb que l’association «Colombières d’hier et d’aujourd’hui» a entrepris de restaurer utilisant la pierre sèche omniprésente dans les champs et montagnes avoisinantes. Un matériau associé à une technique de construction ancestrale qui consiste à empiler des pierres sans liant, ni mortier. Dans le Haut-Hérault, des paysans-maçons ont utilisé cette technique pour agrandir les surfaces cultivables, stabiliser les pentes confrontées à l’érosion, créer des parcs pour le bétail, construire de petites cabanes de berger appelées ici «capitelles», des murs pour retenir ou structurer les terres en terrasses sur des «faïssas», ériger des banquettes ou «barres» pour faciliter le développement des châtaigneraies essentielles à la région. Les accès depuis les vallées y étaient rendus possibles par la construction de chemins pavés appelés «caladas» souvent bordés de murs en pierre pour empêcher les troupeaux d’aller pâturer dans les vergers. L’un des vestiges de cette activité économique est le «secator» ou «sécadou» du village de Roquebrun, petite construction destinée à l’origine à sécher les châtaignes pour mieux les conserver.

Sécadou du village de Roquebrun

Pas de cultures sans irrigation des champs. Celle-ci était assurée par un ensemble de «béals», canaux d’irrigation gravitaire bien visibles à Colombières, permettant de retenir les eaux de pluie ou de capter les nombreux ruisseaux voisins afin de l’acheminer jusqu’aux châtaigneraies en période de sécheresse. Des canaux qui témoignent, comme les gorges de Colombières proches, de l’omniprésence de l’eau sur un territoire sillonné de rivières et de sources, à l’origine de la création des stations thermales voisines d’Avène et de Lamalou-les-Bains. Ce petit patrimoine agricole longtemps délaissé suscite un regain d’intérêt un peu partout dans le monde. De nombreuses associations se mobilisent pour le sauvegarder et le pérenniser, encouragées par l’inscription de cette technique en 2018 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

Crédit : Eric Brendle ADT34

Gorges de Colombières-sur-Orb. Crédit Photo : Eric Brendle ADT34

 

Sauvegarde et restauration de la Tour Carrée de Colombières-sur-Orb

La Tour Carrée de Colombières-sur-Orb

Autre défi à l’actif de l’ association «Colombières d’hier et d’aujourd’hui» la restauration depuis 2008 de la tour médiévale du XIe siècle qui menaçait de s’effondrer. Epaulée notamment par Thérèse Salavin, maire de Colombières et propriétaire de la tour et du château transformé en gîte rural de charme en contrebas, la deuxième tranche de travaux peut être engagée. «Après avoir obtenu l’ouverture de fouilles, nous envisageons maintenant de restaurer les fenêtres et le toit et de sécuriser le site» explique sa présidente Lindsay Grassing. Avec un objectif, faire perdurer un édifice historique qui, pour avoir été le noyau fondateur du village de Colombières au Moyen-Age, participe aujourd’hui de sa mémoire collective. 

 

Des circuits thématiques pour découvrir le patrimoine industriel des anciens villages miniers

Calade à Saint-Gervais-sur-Mare

Ici, dès 1770 et pendant 200 ans jusqu’à 1993, le bassin houiller de Graissessac a constitué un foyer industriel important pour le territoire. De la falaise d’extraction du charbon de La Palène, en passant par le tunnel ferroviaire Saint-Joseph reliant le carreau de la mine à la gare de Graissessac, les anciennes maisons de cloutiers et les mines à ciel ouvert des villages des Nières et Castanet-le-Bas, par celui de Complong et le Puits Durand, la liste est longue des vestiges de ces villages miniers intimement liés à l’extraction du charbon de terre. L’affleurement de ce dernier aux Nières et à Graissessac favorisera vers 1843 une prospère industrie du clou qui sera exportée, comme l’explique dom Joseph Vaissette dans son «Histoire générale du Languedoc». Le dernier cloutier, Lucien Montels situé à Castan, fournissait aux houillères «les clous rampons» utilisés pour la fixation des rails des voies ferrées. Mais le plus célèbre d’entre eux est peut-être la famille Granier, cloutier dès 1600 à Saint-Laurent-des-Nières dans l’arrière-pays héraultais, qui deviendra ensuite esquilier (sonnailler en occitan) et lancera la fabrication de sonnailles, grelots et clochettes au début du XXe siècle qui seront vendus dans tout le sud de la France, en Espagne, en Argentine. A partir de 1931, elle fabriquera des cloches pour l’église du village d’Autignac et le bourdon de Lodève.

Musée de la cloche et de la sonnaille d’Hérépian

La renommée aidant, Joseph Granier fabriquera en 1935 la sonnerie de l’abbaye d’En Calcat et en 1938 celle du bourdon de la cathédrale Saint-Nazaire de Béziers. A partir de 1970, l’entreprise développera une importante activité de fonderie d’art. Elle sera la plus ancienne fonderie de France et la seule à fabriquer les trois sortes de cloches, sonnailles de tôle cuivrée pour le bétail, grelots et clarines en métal fondu et cloches d’église.

En 1998, le Musée de la cloche et de la sonnaille ouvrait ses portes à Hérépian retraçant l’histoire de l’ancienne fonderie Granier fermée en 2011. Géré par la Communauté des communes du Grand Orb, il détient plusieurs labels et distinctions pour la qualité de sa collection et sa muséographie. Il est classé «Musée de France».

Annick Jeanjean, propriétaire du Four à chaux de la Tour-sur-Orb

Un autre vestige de cette époque industrielle, le Four à Chaux de La Tour-sur-Orb retrace l’histoire d’une ancienne usine de production de chaux datant du XIXe siècle qui fait l’objet depuis 2012 de travaux de restauration conséquents. Il est aujourd’hui protégé au titre des «Monuments historiques» pour son architecture originale et son remarquable état de conservation. Une association «Les Amis du Four à Chaux de La Tour-sur-Orb» présidée par Annick Jeanjean anime les lieux par des visites et des manifestations diverses autour de la chaux.

 

 

 

 

Le vignoble du Saint-Chinian entre vallée de l’Orb et Monts du Caroux

Vignoble de Saint-Chinian-Roquebrun

Enfin le Haut-Hérault, c’est depuis toujours une terre agricole à la nature époustouflante, contrastée, composée de garrigues aux terres rouges, de montagnes, de forêts, de vignobles et villages vignerons blottis ou surplombant la haute vallée de l’Orb, comme Roquebrun dénommée «le petit Nice de l’Hérault» grâce à son microclimat qui permet aux citrons, mimosas et autres agrumes d’être omniprésents au détour des ruelles escarpées. Cette petite cité intimement liée à la viticulture jouit de la renommée de son vignoble d’exception (AOC Saint-Chinian-Roquebrun) situé en contrebas du village, de part et d’autre de l’Orb, s’enroulant autour d’une vingtaine de villages au nord-ouest de Béziers, alternant territoire argilo-calcaire au sud et de schistes au nord. Des itinéraires de découverte, visites de caveaux, balades vigneronnes s’y sont développés ces dernières années. Un circuit de «moulins en capitelles» (petite maison vigneronne en pierre sèche restaurée au sein du vignoble) longe les falaises de calcaire du plateau de Guitardes jusqu’au village de Saint-Chinian à travers les vignobles, témoignant du dynamisme d’un territoire qui cultivait aussi l’olivier, les céréales, le mûrier et le genêt utilisé à l’époque dans l’industrie textile.

Famille Maraval, producteurs de safran à la Tour-sur-Orb

Autre époque autre diversification, celle du safran que Sandrine et Christophe Maraval cultivent et transforment dans leur petite entreprise, «La Safranière», située à la Tour-sur-Orb. Un pari osé mais prometteur : très difficile à cultiver (récoltée à la main pendant dix jours seulement au moment de la floraison), cette épice est aussi très demandée dans le monde. En Inde, deuxième producteur après l’Iran, le safran très convoité, qui se négocie quelque 10 000 euros le kilo (il faut 25000 fleurs pour en produire un), fait vivre des familles entières au pied de l’Himalaya.

 

 

 

www.patrimoinesheraultourisme.fr
www.tourisme.grandorb.fr

les Amis du Haut pays d’Orb
www.compagnons-sens.fr
www.notredamedenize.fr
association «Colombières d’Hier et d’Aujourd’hui»
www.fourachauxlatoursurorb.fr

Safrandeshautscantons.fr
www.haut-languedoc-vignobles.com

www.saintgervais-hautlanguedoc.fr / La Maison Cévenole des Arts et Traditions Populaires
www.avenecenter.com / Station thermale d’Avène

  • Pour résider sur place :

www.gites-de-charme-languedoc.com
Gîte rural de Colombières-sur-Orb au Château Bas
Gîte rural au Hameau de Saint-Barthélemy à Lunas

  • A lire :

En Quête de sens, Frère Marie Pâques /Abbaye de Lérins
Saint-Gervais et ses environs, Jules Anton /Frèrerie de Ferrières(1980)
Histoire générale du Languedoc, dom Joseph Vaissette

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