Il y a des cités qui recèlent des richesses insoupçonnées. C’est le cas de Saint-Quentin dans l’Aisne, ville d’art et d’histoire qui possède un magnifique patrimoine Art déco disséminé dans toute la ville. Remis en valeur depuis dix ans par la municipalité dans le cadre d’un plan »Art déco »il constitue aujourd’hui la pièce maîtresse d’une stratégie touristique résolument tournée vers l’international.
Longtemps ignoré, passé de mode, méprisé par certains, le style Art déco a aussi été détérioré. Or ce style architectural qui a de nombreux adeptes dans le monde est fortement présent dans cette ville sous forme de 3 000 édifices comportant des éléments d’Art déco et de 277 façades classées. Au cœur de cet ensemble cohérent quelques pépites méritent largement le détour : citons pour les plus spectaculaires le buffet de la gare aux belles mosaïques signées Auguste Labouret longtemps recouvertes de papiers, murées depuis 1980 qui vient d’être restauré pour accueillir les hôtes de marque du nouveau TGV reliant Paris en 1 heure 20, l’ancien cinéma Casino dont les stucs bientôt restaurés par les élèves des métiers de l’ameublement devrait devenir maison de quartier et bureaux pour l’université, les anciennes Nouvelles Galeries achevées en 1927 qui accueillent l’expo « 1920 à Saint Quentin, cinéma et music-hall », le Pont de l’Isle, le Hall de la Poste centrale, l’ancien cinéma « Carillon », la place du huit –octobre et sa statue monumentale. Une mention spéciale pour la magnifique salle du conseil municipal de l’Hôtel de ville richement dotée de boiseries sculptées et de magnifiques lustres d’origine conçus par Louis Guindez où les lampes Arbres et bouquets illustrent parfaitement la stylisation et la géométrisation des formes végétales développées par l’Art déco. A noter particulièrement les cinq appliques polygonales et neuf lanternes-appliques de cette lustrerie réalisées par les serruriers saint-quentinois Carpentier qui associent de façon innovante pour l’époque fers forgés, verres plats dépolis et pâte de verre moulée à motif végétal. Autant de chefs-d’œuvres qui aujourd’hui se visitent avec un guide suivant un parcours ou se mêle intimement art et histoire…tragique ici puisque l’Art déco symbolise la renaissance d’une ville détruite à 80% pendant la première guerre mondiale. La cité en effet se trouvant pour son malheur au cœur de la ligne Hindenburg soumise au pilonnage systématique de l’artillerie française. Pour reconstruire ses responsables vont choisir l’audace. Ils ne vont pas recopier le style architectural existant avant-guerre, mais vont au contraire innover en optant pour des formes plus épurées, géométriques, à angle droit, plus colorées créant ainsi un ensemble cohérent sur lequel les autorités comptent s’appuyer pour attirer dans ses murs le prochain congrès de l’ICAD (International Art Déco Societies) qui fédère des dizaines de villes à forte dominante Art déco à l’étranger comme Shanghai, Chicago, Cleveland, Auckland, Montréal, Boston mais aussi à Perpignan ou Paris en France.